par Bastien Silty
Dans cette édition spéciale où chacun se dévoile, je dois avouer ce que je fais depuis plusieurs semaines.
Certains le savent, certains en rigolent, certains s’en fichent et d’autres ne comprennent pas.
La majeure partie de mon temps libre (et non-libre) fut occupée par le dessin animé Foot 2 Rue de Marco Beretta et Serge Rosenzweig. Je parlerais principalement de la série franco-italienne initiale qui était diffusée sur France 3 et Rai 2 (chaîne italienne) entre 2005-2010 (en France) et 2006-2012(en Italie). Avant de rentrer dans les détails, il est important de préciser que cette série est destinée aux enfants (de 6 à 12 ans) et présente sur le service public. Elle est disponible aussi en accès libre sur Youtube sur la chaîne officielle Foot 2 Rue / Foot 2 rue Extrême.
L’histoire se déroule principalement dans la ville fictive de Port-Marie, une ville du bassin méditérannéen du sud de la France ou du Nord de l’Italie. On fait alors la rencontre de différents acteurs de la ville.
En commençant par le haut de l’échelle, on retrouve les aristos avec les Riffler dépeints comme des gens pressés dénués de compassion ne vivant que pour être bien vu.
Ensuite, se trouve le duo Maroni-Pradé respectivement maire et agent de police.
Le premier n’a qu’un seul but, améliorer la réputation de la ville et tente de la vendre comme une ville paisible en bord de mer où la pauvreté n’existe pas, du moins on ne la voit pas.
Il existe dans cette ville deux écoles qui cohabitent : l’institut Riffler dirigé par la “Zelle” (diminutif de Mademoiselle, car on est en 2005) et le collège Saint-Xavier. On retrouve la dualité des études françaises entre le privé et le public. Si le premier semble être un lieu de vie paisible et relativement libre, le second se fait dans l’honneur de la tradition de la méritocratie où l’on se dénigre, s’enfonce et dont le seul souhait laissé par ce collège est de le quitter rapidement.
Enfin, on retrouve les commerçants qui souhaitent survivre ; et le gang de “Requin”, des enfants à la rue qui passent leur temps à s’amuser et trouver de quoi manger.
Avant de passer à la brève étude des bleus, j’aimerais revenir sur les deux jeunes définis comme méchants : Ben dans la saison 1 et Vic dans les saisons 2 et 3.
Le premier est un jeune vivant dans un HLM avec son père alcoolique et sans emploi.
Il comprend très vite que pour s’en sortir, il doit réussir, les études n’étant pas pour lui, il fait alors tout pour rentrer à l’Olympique (le club de foot professionnel de la ville.)
Il n’a donc pas le choix de se faire remarquer pour ses talents footballistiques.
D’un naturel leader il se met en tête que représenter Port-Marie lui permettra d’ouvrir les portes d’un monde plus simple.
Vic a déjà une vie tracée, fille du principal de Saint Xavier ses notes lui permettent d’intégrer une grande école et de réussir sa vie. Mais ce qu’elle veut, c’est d’abord se venger d’Éloïse et assurer la réussite et l’excellence de l’école de son Papa.
Ben finit avec un meilleur sort que Vic. S’il ne rentre pas à l’Olympique, il intégrera les bleus pour deux matchs, trouvera un travail sur la capitale et montrera à son père qu’il est possible de s’en sortir.
On remarque à travers cet exemple que la série tient un point d’honneur : soyez heureux, dans l’illégalité si nécessaire, dans la galère si elle est forcée.
À l’inverse, pour Vic, le dessin animé annonce : soyez revanchard, souhaitez écraser les autres et vous ne connaîtrez que les échecs.
J’aimerais que la réalité soit si simple, mais je suis forcé de boire du thé et de rêver.
Les bleus (l’équipe principale de la série) sont composés de 5 à 7 jeunes. Sébastien “Tag” Arias Di Soler Tagano, le capitaine des bleus, est le fils d’un révolutionnaire argentin (absent la majeure partie de la série) et vit alors exclusivement à l’Institut Riffler.
Gabriel N’Douala, enfant d’une mère sénégalaise et d’un père indien, tous deux médecins, ils sont forcés de vivre loin de Port-Marie. Pensionnaire de l’institut Riffler, il ne souhaite que pouvoir passer plus de temps avec ses parents.
Ensuite, on retrouve les frères jumeaux Tarek et Nordine Zaim : ainés d’une famille de 11 enfants, ils intègrent le pensionnat de Riffler. Rapidement, leur présence dans les bleus se joue entre les week-ends où ils n’ont pas à garder leurs frères et sœurs et lorsqu’ils ont la permission de l’Olympique (qui les recrute lors de la saison 2, une aubaine pour leurs parents qui assument avoir du mal à joindre les deux bouts.)
Pour compléter l’équipe, il y a la gardienne : Eloïse Riffler, fille du comte et de la comtesse Riffler à qui appartient l’institut. Elle est dans le collège de Samira, la sixième joueuse bleue forcée de faire son test d’admission dans l’équipe championne du monde en jogging et sweat à capuche afin de se faire passer pour un homme.
Jérémy Weber est le dernier joueur, pensionnaire de l’institut après s’être fait exclure de 9 établissements scolaires.
Ça fait combien de temps que l’on a pas apprécié une série avec des personnages ayant un passé aussi riche ?
Cette équipe est au couleur des espoirs de l’époque : celle de La France Black, Blanc, Beur. Les différences de chacun étant censé permettre la grandeur de tous et assurer la cohésion. Si la série réussit à faire tenir ces idéaux dans son équipe phare, la France a échoué en déroulant le tapis rouge au racisme. Dans cette lutte contre le racisme, on peut aussi parler de la représentation des différents joueurs. Un mondial de Foot de rue étant organisé à Port-Marie, plusieurs pays sont conviés à participer. On retrouve alors des pays souvent représentés tel que la Chine, le Japon, les États-Unis (on note que ce sont 5 filles du Bronx qui représentent le pays) ou le Brésil. Pour autant, on apprécie la présence d’Israël, de l’Écosse, de l’Océanie, de la Jamaïque, de la Russie, de l’Argentine, de la Roumanie, du Kenya, du Groenland, de l’Afrique du Sud, du Vietnam, de la Tunisie, de la Malaisie, de l’Égypte et du Sénégal.
C’est donc un sacré paquet de pays représentés. Quant aux personnages, il est nécessaire de préciser qu’ils ont tous un visage différent (oui, c’est rare de voir tant de différences). Et ils ne sont pas tous blancs mais aux couleurs des habitants du pays. (On salue le whitewashing du reboot des Winx.)
Les blagues racistes ne sont pas présentes et ni leurs dessins, ni leurs voix ne sont risibles. On constate aussi la recherche dans la diversité des noms et la tentative de sortir du cliché et de la simplicité.
La série étant destinée aux enfants, il y a aussi le besoin de représenter le pays au travers de ce qui crève l’écran, on retrouve alors les Mangas du Japon, les panthères de Soweto, les Wallabies d’Australie ou les Dreads de Kingston…
Il y a tant de choses à dire sur cette série, notamment sur les relations entre riches et pauvres définis par Tag et Eloise et cette phrase mythique du capitaine, “c’est sûr que c’est plus simple de passer le week-end avec des bourgeois que de jouer au Foot de Rue.” Je pourrais aussi parler de la question de la sécurité avec l’inutilité de l’agent Pradé et l’efficacité du service des Requins du Port qui, grâce à un système ingénieux de transmission d’informations et de connaissance de la ville, évite qu’un joueur se fasse embarquer.
Si je n’ai pas parlé de la Série Foot 2 Rue Extrême, c’est simplement car elle n’embrasse pas la volonté de décrire un système complexe, mais tente seulement de mettre la lumière sur des maux personnels. C’est toujours sympa, mais elle le fait moins bien que l’autre dessin animé du même essaim Les Minijusticiers.
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