Le pastel

Par Charlotte Ducloux

Apparence et propriétés de la plante :

C’est une plante haute de 20 à 25 cm lors de sa première année, pouvant atteindre les 1m50 lors de sa seconde. Elle pousse dans des lieux où le climat est tempéré, sur les sols assez secs, et est reconnaissable à ses petites fleurs jaunes de 3-4 mm chacune, regroupées en grappes, qui éclosent entre avril et juin.  

Elle a une vie courte, mais bien remplie, puisque c’est une plante mellifère, c’est-à-dire qu’elle est butinée par les abeilles pour faire du miel. Elle fait également des fruits, appelés siliques, dans lesquels se trouvent ses graines.

Du côté de l’utilisation de la plante dans son entièreté, c’est une plante fourragère, destinée à l’alimentation animale. Mais c’est aussi une plante à propriétés médicinales utilisée depuis l’Antiquité. Ainsi, le médecin et pharmacologue grec Dioscoride (Ier siècle) utilisait les feuilles en cataplasmes pour traiter les œdèmes, plaies, tumeurs, etc. Et en boisson pour les problèmes de la rate.

Ses écrits sont conservés et servent à différentes époques comme le Moyen-Âge ou la Renaissance, et même encore après. Le médecin botaniste Italien Matthiole (XVIe siècle) suit son prédécesseur et recommande l’application des feuilles sur les blessures pour les aider à cicatriser et guérir les ulcères. La plante est également employée comme antiscorbutique. 

La teinture :

L’espèce d’origine de la plante est Isatis Tinctoria. Le nom que l’on utilise couramment, “Pastel”, vient du latin “pasta” qui veut dire “pâte”. Cela vient du fait que les feuilles de la plante étaient broyées dans des moulins, et finissaient par former une pâte fermentée et séchée ensuite. On emploie également le terme “pastel des teinturiers”  pour désigner la plante, en la distinguant ainsi du pastel utilisé en arts plastiques. 

Le processus pour obtenir la teinture est relativement long. D’abord, les feuilles sont récoltées sur des pieds de 4 mois environ, entre mi-juin et mi-septembre. Elles sont ensuite nettoyées, séchées, puis broyées. On fait ensuite sécher la pâte obtenue jusqu’à ce qu’elle durcisse et fermente, ce qui prend 8 semaines. 

Là, elle est écrasée et mise en boule de la taille d’un poing à celle d’un pamplemousse. C’est ce que l’on appelle les “coques”, “cocagnes” ou encore “guesdes”. Ces cocagnes sont mises à sécher pendant 4 mois. À la fin de ce temps, elles sont devenues noires et leur taille s’est réduite, ce qui rend leur transport plus facile. 

Les boules sont par la suite réduites en poudre, qui est aspergée d’eau (ou d’urine) pour la faire fermenter. Le pastel est remué à la pelle dans une cuve et chauffe en fumant. La teinte noire que prend le pastel est nommée Agranat.

Le pigment colorant du Pastel est un sous-produit de la teinture : c’est en fait l’écume des bains de teinture qui est recueillie. Séchée, elle donne une poudre bleue, notamment adéquate pour la peinture.

Une plante qui voyage :

Comme dit plus haut, les premières traces de l’utilisation du Pastel remontent à l’Antiquité. C’est une plante qui n’a pas besoin de conditions particulières pour pousser. Aussi, nous retrouvons des traces de sa culture en Chine, pour ses propriétés médicinales, en Egypte, où ils teignaient les bandelettes pour envelopper leurs momies avec. 

Selon les archives marseillaises, ce seraient les Maures qui introduisirent le Pastel en Europe du Sud. Enfin, c’est au XVe siècle qu’il gagne l’Angleterre, tandis que les pays nordiques découvrent les propriétés tinctoriales de la plante.

En France, durant la Renaissance, une ville en particulier se spécialise dans le pastel : Toulouse, qui en tire son surnom de “Pays de Cocagne”. La ville s’impose dans le marché européen de ce bleu. Beaucoup de pasteliers s’y installent et bâtissent des hôtels au nom du bleu dans la ville rose. 

Le commerce connaît cependant un déclin avec l’arrivée de l’Indigo venu de l’Inde. Déclin que Napoléon Ier prendra en main en créant une école expérimentale à Albi pour extraire plus efficacement le colorant des feuilles. Cela portera largement ses fruits : grâce à ça, la couleur n’est plus extraite en 8 mois, mais en seulement quelques jours.  

Toutefois, l’industrie du Pastel ne put rivaliser avec les techniques plus modernes qui vinrent ensuite, avec l’émergence des colorants de synthèse et l’industrialisation de masse. 

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